Depuis le début de l’été, le marché des transferts bat son plein, notamment en France. Avec les arrivées de Falcao à l’AS Monaco et d’Edinson Cavani au Paris Saint-Germain, la France tire largement son épingle du jeu avec des montants avoisinants les 150 millions pour les transferts hexagonaux.
Pourtant, les montants astronomiques annoncés chaque jour ne font qu’amplifier une situation délicate du football européen : le marché des transferts actuel est une catastrophe absolue pour le business model du football. L’année dernière, le think tank Terra Nova a publié un rapport dans lequel il est expliqué que le football européen, en tant que centre de gravité du football mondial, menace l’économie de ce sport.
Dans un article paru dans le journal Le Monde, le co-président de la FIFPro (syndicat des footballeurs profressionnels) appelle à mettre fin au marché des transferts, car ce dernier est aujourd’hui, malgré les sommes pharamineuse que nous voyons, dans une situation économique dramatique, allant même jusqu’à le considérer comme illégal.
En effet, le marché des transferts fonctionnent de la même manière que des marchés financiers. Avec une spéculation à la hausse sur les montants des transferts (aidés en cela par les agents de joueurs), les clubs européens qui encaissent les indemnités de transferts financent, à mauvais escient, leurs nouvelles dépenses avec des plus-values financières comme sur un marché boursier.
Nous sommes ainsi en plein dans un marché spéculatif. Tant que le marché est la hausse, ce qui est largement le cas aujourd’hui, la bulle spéculative ne cessera de gonfler. Mais si le marché se retourne c’est le krach généralisé. Le marché se trouve donc en situation de risque systémique.
Malgré des recettes d’un niveau jamais atteint en 2011, les clubs européens ont enregistré un autre chiffre record : celui du plus gros déficit jamais vu. Avec 1,6 milliards d’euros de pertes enregistrées, les 734 clubs de première division des 53 associations européennes sont de plus en plus dans le rouge (+33% sur 1 an).
Cette fuite en avant opérée au milieu des années 90 avec la libéralisation des transferts et l’arrêt Bosman, met en lumière les expédients auxquels les clubs ont recours pour financer leurs dépenses et pour assurer leur avenir.
Premier expédient : la cause principale des dérapages budgétaires des clubs est incontestablement la hausse exponentielle des salaires des joueurs européens. La masse salariale moyenne des clubs atteint près de 80% des recettes ! Les clubs se livrant une concurrence accrue avec l’arrivée de bienfaiteurs étrangers qui n’agissent pas dans une logique de rentabilité de leurs investissements. Dans ce cadre, l’immense majorité des clubs ont recours au surendettement. Il est favorisé par la transformation des contrats en actifs financiers dans les bilans des clubs, ce qui les gonfle de manière artificielle, les contrats des joueurs n’étant pas évalués de la même façon.
Deuxième expédient : Qui n’a pas entendu un président de club qu’il avait besoin de vendre avant de recruter ? Les clubs européens ont profité de la libéralisation du marché des transferts par l’arrêt Bosman en 1995. Grâce aux ventes des joueurs régulières, les clubs engrangent des plus-values financières avec lesquelles elles recrutent de nouveaux joueurs. Au lieu de régler leurs dépenses par des recettes commerciales pérennes, les clubs ont donc recours à des plus-values financières. Comme à la Bourse… Ces plus-values contribuent à la formation d’une immense bulle spéculative de type « subprimes. »
Troisième expédient : L’arrivée de mécènes dans le milieu de foot. Ces investisseurs ou bienfaiteurs, c’est selon, n’arrivent pas avec une exigence de rentabilité, même à long terme. Leur stratégie, notamment celle du Qatar avec QSI, est surtout de booster son image avec le Paris Saint-Germain. Dans ce cadre, ils dépensent sans compter, sur des joueurs en investissant des sommes irréalistes. L’exemple de l’oligarque russe Roman Abramovitch à Chelsea est saisissant : il a dépensé plus de 2 milliards d’euros en dix ans à Stamford Bridge.
Le président de l’UEFA Michel Platini conscient de la nécessité d’une régulation impose aux clubs européens le principe du Fair-Play Financier. C’est une sorte de règle d’or budgétaire pour les clubs avec un leitmotiv, ne pas dépasser plus qu’on ne gagne. Le principe est le bon, et s’il permet de quelque peu dégonfler la bulle qui s’est créée, cet effort est le bienvenu.